in: Bénat-Tachot, Louise, Vilar, Jean (dir.), La question du lecteur. XXXIe Congrès de la Société des Hispanistes Français. Mai 2003 , Marne la Vallée, Presses Universitaires de Marne-la-Vallée, 2004, p. 99-121.
IN LIBRO.
LECTOR
A François Lopez
Avant que la triade auteur-texte-lecteur ne devienne pour ainsi dire Trinité, j’ai, avec d’autres, longtemps cherché à savoir qui était le public et où il se trouvait. Dans le prolongement du colloque sur Creación y público en la literatura española (1972) où Noël Salomon avançait déjà la notion de lecture plurielle [1] , dans le cadre d’une sociologie historique de la littérature plus escarpitienne que goldmanienne, je me suis attaché à mesurer les capacités de lectrices des espagnols entre 1860 et 1920, le succès public de différents romanciers (Galdós, Ricardo León, Blasco Ibañez), la diffusion de la presse ( Madrid cómico ) ou l’offre de romans au temps de La Regenta [2] , mais aussi depuis une sociologie de la réception d’étudier les attentes et le comportement des différents publics de Galdós, de celui de Pequeñeces , ou de La Aldea perdida de Palacio Valdés et leur éventuelle incidence sur les œuvres, sur le sens voulu et sur le sens donné [3] . Cette soif de mesurer et connaître les lecteurs historiques réels (puisque la notion de public englobe les spectateurs, les auditeurs et les lecteurs),m’a permis d’établir, à partir de listes de souscripteurs, que 95% des souscripteurs du Boletín del profesorado de la provincia de León étaient… des maîtres d’écoles de la province de León, mais aussi de comprendre comment tant de sérieux d’avocats, pharmaciens, ingénieurs, lecteurs du futile Madrid Cómico, étaient prêts à transgresser la norme qu’ils avaient eux-mêmes édictée, mais en restant, en quelque sorte, à l’extérieur des textes.
A la fin des années 1980, depuis une esthétique de la réception, selon Jauss ou Yser, mais aussi une vision coopérative de l’interprétation d’œuvres plus ou moins ouvertes ou fermées, selon Umberto Eco, s’est fait jour un intérêt pour le lecteur à l’œuvre dans le texte, à partir d’un pacte explicite ou non, mettant en lumière un savoir lectorial supposé ou construit chez les lecteurs de Galdós ou d’Unamuno, par exemple [4] .
Au début des années 1990, la sociologie et l’histoire sociale de la lecture privée et publique m’a permis d’étudier, après les discours sur la lecture [5] , les pratiques de lecteurs réels, «historiquement et socialement situés» (Mauger, 1999, 144), celles des nouveaux lecteurs y compris parfois dans leur individualité, mais aussi les «lecteurs-auditeurs» («escucha lector») et les lecteurs d’images («esto que ves lector»), et même les lecteurs analphabètes et non lisants [6] .
A la même époque, la sociologie des textes selon Mac Kenzie, divulguée par R. Chartier [7] , c’est-à-dire, non seulement le para ou péritexte selon Genette, mais toute une esthétique du livre, m’a amené à examiner, à propos de La Regenta et d’autres objets textuels, la fonction expressive des dispositifs formels à l’œuvre dans le livre et leur rôle dans la construction du sens par le lecteur [8] .
Cette rapide évocation d’un chemin emprunté il y a longtemps maintenant, au bord duquel j’ai déposé trois douzaines d’études, ne vaut évidemment pas réflexion épistémologique ni historiographique [9] , mais elle m’a semblé nécessaire pour expliquer comment un parcours s’inscrit dans une certaine cohérence historique et dans la continuité, et comment on peut, après bien des années occupées à faire l’histoire du livre, en arriver , dans une perspective maintenant plus anthropologique, à se poser la question du lector in libro .
Chercher le lecteur dans le livre -le lecteur empirique, en chair et en os, et non «de papel» (Garrido, sd)-, cela peut a priori ne pas sembler incongru: le livre s’adresse au lecteur qui de façon métonymique lit un livre comme un auteur écrit un livre. Lector in libro , c’est , en écho à lector in fábula , dire le contraire de lector in vitro ; c’est désigner le lecteur à l’œuvre dans le livre, le lecteur que chacun d’entre nous peut être mais aussi bien d’autres que celui que l’auteur imagine ou s’efforce de configurer et que nous avons l’habitude d’ignorer.Un programme mais aussi une construction originale à rechercher dans la vivante matérialité du livre, en s’efforçant d’interpréter les indices et les traces que le lecteur y a laissées qui rendent compte de cette coopération entre le livre et le lecteur, de ce que le livre dit au lecteur et sur le lecteur, de ce que le lecteur dit du livre et, surtout, au livre, en contemplant, par hypothèse, une infinité de lecteurs dans une infinité de livres.
L’archéologue des pratiques ou usages liés au livre, le chiffonnier qui fouille dans les livres à la recherche de précieuses traces, ne dispose qu’exceptionnellement –c’est le cas des bibliothèques d’écrivains- de gisements archéologiques des pratiques ou traces de communautés de lecteur; le plus souvent, il lui faut «inventer» les sites [10] . Il convient donc entendre ce travail d’enquête, d’exhumation, de reconstitution, ainsi que les premières tentatives d’interprétation auxquelles il donne lieu ici, dans le cadre problématique plus large de la lecture et de la Trinité évoquée, comme un travail en cours de réalisation.
Ce que le livre dit au lecteur et du lecteur.
Par sa forme ou par sa destination, le livre, mais aussi la presse, les formes imprimées en général, implique des façons de lire, des stratégies, une gestuelle dérivée: de l’antiphonaire au livre-qu’on-ne-lit-que-d’une-main, l’habileté à manier le livre, à tourner ou trouver les pages, le mouvement des yeux, etc., sans parler de la mémoire de travail ni des moments ni des lieux, renvoient à un lecteur en chair et en os, doté de ses cinq sens ou presque [11] .
Le livre est, en effet, conçu comme une «machine de lecture» à travers le système purement typographique de «marques du discours» (Torné, 2001). Comme le rappelle R. Chartier, la mise en texte, la mise en page ou la mise en livre ont une fonction expressive parfois explicitée par l’auteur lui-même, comme un hyperprogramme de réalisation du texte [12] .
Laissons-de côté tout ce qui dans le paratexte renvoie au lecteur à l’œuvre dans le livre, comme par exemple cette liste de «cadeaux» qui figure dans El Hijo de la obrera de Luis de Val relié en deux tomes de 10 et 9 cm d’épaisseur et qui explique -peut-être- pourquoi au moins un lecteur a accepté d’acquérir au fil des semaines 310 livraisons de 8 pages et, certainement, le manque systématique au bas de la première page de chaque livraison qui correspond au coupon à découper dont la collection complète est nécessaire pour pouvoir prétendre à l’un des 20 cadeaux proposés … [13] : le programme éditorial comporte la mise en œuvre d’une façon de lire et la production d’un certain type de livre, le livre par livraisons (Botrel, 1974, 2002a).
L’auteur lui-même imagine, par ailleurs, le lecteur à l’œuvre dans le livre. C’est le cas de Miguel Delibes qui, pour la première édition de Cinco horas con Mario , prétend, à travers la composition typographique -il parle de «pequeñas novedades tipográficas»- exprimer l’état d’esprit de Carmen. D’où son choix: «la tipografía –letras redondas- no debe variar de los fragmentos bíblicos al soliloquio. Carmen ignora cuando lee y cuándo piensa; cuando termina de leer y empieza a pensar. Hay un automatismo, cuyo arranque es paulatino a partir de una mente acorchada y en blanco. Esto no lo digo yo, novelista; se lo dejo ver al lector a través de la composición. Quiero decir que no se trata de una originalidad gratuita. Responde a unos fundamentos sólidos que están en la entraña misma de la novela» [14] . Finalement, devant les réticences et même l’opposition de son éditeur, il se résignera: «En cursiva la Biblia y, sin solución de continuidad, el texto en redondas» [15] , cet épisode –il y en d’autres- étant révélateur de tensions entre la volonté auctoriale d’instrumentaliser le livre pour des effets de sens, et les habitudes lectoriales dont l’éditeur –plus conservateur en l’occurrence- se porte le garant [16] .
Il existe, par ailleurs, dans le livre, un discours qui trouve son origine hors du lecteur mais qui le vise expressément: c’est le cas des dédicaces manuscrites ou non, qui sacralisent et personnalisent le livre qui les portent [17] , mais aussi de nombreuses observations ou recommandations qui s’adressent explicitement au lecteur, pour l’aider dans son usage. On peut ainsi trouver sur l’édition par B. Mayol, à Barcelone, en 1844, de El Cornudo de Ch. P. de Kock, cette mention imprimée: «El marido permitirá su lectura a la esposa», ou sur la garde d’un exemplaire de La gran villa o Paris hace 25 años , du même auteur (Valencia, Librería de Pascual Aguilar, 1877), écrit au crayon bleu et souligné de rouge: « ¡¡Gracioso!!» [18] .
Ces interventions dans le livre peuvent, évidemment, concerner le texte lui-même, comme dans le cas, bien connu, de caviardage par la censure, mais aussi, plus simplement ou habituellement, de consignes de lecture portant sur tel ou tel passage [19] , dans des livres en quelque sorte spécialement «préparés» pour un lecteur particulier : tout un paratexte sans vocation à être imprimé (comme peuvent l’être des gloses ou des notes explicatives) qui entoure le texte et l’autorise dans la forme livre.
De ce point de vue, s’intéresser à la matérialité du livre et à ses usages dans le cadre d’une histoire de la culture matérielle, ce n’est pas simplement faire de la bibliographie matérielle, c’est découvrir l’infinie variété de son être, mais aussi de ses usages, se livrer à une sorte d’archéologie , de reconstitution des usages et, par l’histoire, rappeler et réaliser l’effectivité toute contemporaine –potentiellement et à l’infini- de ces relations qui s’établissent ( vs qui sont établies) autour du livre, puis dans le livre, et qui d’une façon ou d’une autre rendent compte d’usages révélateurs d’attentes -d’espoirs ou de frustrations-, par elles mêmes significatives.
Ce que le lecteur dit du livre et au livre. Il s’agit, en l’occurrence, de rechercher dans le livre, en vue de leur interprétation, les traces d’appropriation matérielle –instrumentale- et intellectuelle par le lecteur.
C’est ainsi, comme j’ai eu l’occasion de le montrer [20] , que la confection –la fabrication- ou l’habillage du livre peut être révélateur des attentes et désirs de livre de la part du lecteur, depuis une certaine représentation mais aussi un certain savoir.
C’est le cas du livre résultant du découpage du feuilleton dans le journal ou du livre en feuilles ou à construire à partir de livraisons ( vs le livre relié ou tout fait), qui rend compte d’un lecteur, sans doute momentanément contraint à une lecture échelonnée et fragmentée ( vs une lecture libre) mais aussi d’un lecteur collectionneur et artisan de son livre, qu’on imagine habité du même sentiment qu’un fumeur bourrant sa pipe ou roulant sa cigarette, mais veillant également à ce que les illustrations se trouvent placées de telle sorte qu’elles soient en vis-à-vis du texte qu’elles explicitent et où se trouve insérée la légende.
La reliure elle-même, lorsqu’elle n’est pas éditoriale, parle du lecteur qui l’a choisie pour son livre. Et il ne s’agit pas, principalement, comme on a tendance à le croire, de reliures artistiques, mais de simples brochages [21] ou de reliures sommaires, parfois faites par le lecteur lui-même [22] , qui prend grand soin de marquer sa propriété [23] .
Cette infinité de modalités dans la collection et la reliure d’un objet reproduit à l’identique rendent compte de représentations du livre, de valeurs emblématiques et même affectives qui, tout en renvoyant à des standards sociaux, varient évidemment avec les individus.
La même logique a pu présider aux opérations d’addition mais aussi de soustraction [24] , qui témoignent elles aussi de la présence du lecteur dans le livre.
Le cas des livres truffés, si appréciés des bibliophiles par leur caractère unique, peut servir à révéler des pratiques mélioratives individuelles qui ne sont pas l’apanage des esthètes et supposent des stratégies d’enrichissement et d’interprétation impliquant parfois le choix de mutiler d’autres imprimés mais aussi l’écriture.
A côté de l’exemplaire de Marinero en tierra préparé par Rafael Alberti à l’intention de María Teresa León [25] , on trouvera, en effet, un infinité de livres de cuisine précairement truffés de recettes (découpées ou manuscrites) utilisant l’ordre du livre pour des attentes plus ou moins utiles ou vitales ou bien encore un pauvre livre, comme El castillo maldito où l’adjonction d’illustrations découpées dans le journal ABC vient valider une lecture mais aussi améliorer l’être physique d’un livre «muet» [26] .
Cette représentation du livre peut pousser à la confection de livres uniques,construits à partir d’un projet social [27] ou, plus matériellement, de livres défaits ou récupérés [28] , et d’imprimés mutilés [29] .
On peut ajouter à cela tout ce qui est confié au livre-écrin,comme prolongement ou projection de soi, sorte de boîte à secrets où s’abritent des objets chers, sans lien direct avec le textemais qui parlent –lorsqu’ils ont été conservés- de l’environnement d’un lecteur qui n’est d’ailleurs pas forcément contemporain du livre édité [30] : depuis les notes manuscrites, comme celles de Mario, selon Delibes [31] , jusqu’aux objets les plus insolites, à condition d’être plats et intercalables. Dans cette sorte d’anthropomorphisation du livre considéré comme meilleur compagnon, confident ou miroir [32] , il n’est pas facile d’interpréter la sédimentation qui s’opère comme dans tous les lieux de vie, mais en tenir compte est déjà une attitude ouverte sur la dimension affective que comporte tout acte de lecture et relation avec le livre de la part d’un lecteur fait de volonté et d’intelligence, mais aussi de chair et de sentiments.
Mieux conservées, sinon plus fréquentes, sont les marques manuscriteset parfois imprimées sous forme d’ajout apposées sur le produit standard par le lecteur lui-même.
Ce sont assez fréquemment les marques de propriété parfois préimprimées ( ex-libris ) ou imprimables (cachets secs ou à encre) [33] ,pour se distinguer de la simple apposition de la signature ou des initiales du propriétaire, quelquefois répétées dans le corps du livre, et parfois accompagnées de la mention de la date et du prix [34] .
Plus rarement, il s’agit un discours plus construit et développé: depuis «Soy de…» «Mi dueño es» jusqu’à plusieurs lignes, sur la garde, le faux-titre ou la page de titre, qui peuvent être convenues et même rituelles [35] , mais aussi comporter une certaine originalité [36] .
En quoi ces indices parlent-ils du lecteur ou de la lectrice, et comment sont-ils utilisables?
D’un simple point de vue statistique, l’apparition de marques de propriété féminine, par exemple, mais aussi leur disparition est révélatrice du prix subjectif que le propriétaire du livre accorde à celui-ci: c’est le cas du propriétaire du Catecismo explicado de Mazo dont le discours de mise en scène de son acquisition est reproduit et commenté par ailleurs [37] .
Mais ces marques parlent aussi de la transmission du bien livre comme bien susceptible d’être lu par ses propriétaires successifs, de son abandon ou encore de son appropriation plus ou moins «sauvage» par les enfants, par exemple, sans parler des traces mécaniquement laissées sous forme d’odeurs, de traces de doigts, de coins cornés, de pages ravaudées, les gribouillis intempestivement laissés ça et là, qui témoignent d’un grand ou multi-usage. Elles peuvent renseigner sur le mode d’appropriation instrumentale d’un livre, d’un journal, etc.
Car le livre peut également conserver des traces rendant compte de son mode de lecture, au sens instrumental du terme; d’une lecture fragmentée ou plus ou moins continue. Tel est le cas du lecteur anonyme -plutôt nocturne- de Cánovas , episodio nacional de Galdós qui, entre le 30 novembre et le 4 décembre 1936, marque, avec le même crayon violet marque d’une croix, sur un exemplaire de 1912, l’endroit où il délaisse sa lecture et précise parfois le jour et même l’heure où il la commence ou bien l’achève [38] .
De la même façon, les notes manuscrites sur papier libre trouvées dans un exemplaire de la 4 e édition de La Bruja blanca (Primera parte) de Julio Ascano peuvent attester de modalités de lecture oralisée et sous contrôle, au bénéfice présumé d’ouvrières d’un atelier de couture (Botrel, 1993).
Restent à examiner les traces d’appropriation intellectuelle, les plus connues, et les plus désirables aussi, parce que plus exploitables et plus rares.
Comme le rappelle utilement A. Castillo Gómez (2001), à l’attention des historiens de la lecture, le lecteur est souvent aussi un scripteur, et en défendant une conception de la paléographie, il invite les chercheurs à remarquer que les parties blanches (non imprimées) du livre incitent aussi à une écriture de tout statut, y compris, bien entendu, celles non accidentelles qui rendent compte de la relation expressément construite avec le texte, depuis un projet de lecture, le crayon ou la plume à la main.
Bien sûr, les traces de lecture des livres peuvent être conservées à l’extérieur de celui-ci (dans des journaux intimes, des lettres, etc.) ou, de façon encore plus vulnérable, être insérées sous forme de fiches de commentaire… Une preuve de plus de ce que le monde du livre est particulièrement peuplé de traces d’écritures qui peuvent renseigner sur les attentes de celui qui lit à des fins utilitaires ou de recréation, mais aussi sur ses déviances ou ses aspirations.
C’est ainsi, par exemple, que l’ Album del Bardo. Colección de artículos en prosa y en verso de varios Autores (Madrid, Imprenta de Boix, Mayor y Compañía, 1850) a inspiré un certain Benito Blanco Fernández, au point qu’il y reporte sur le recto et le verso de la page de faux-titre et au verso de la page de titre un «Epigrama», un «Madrigal», une composition poétique «A mi querido Catedrático Policarpo Mingote», et une «Balada» de sa plume datées de «León, enero de 1877», comme s’il s’incluait lui-même dans une anthologie où l’on trouve des poètes et écrivains de référence. Cela ne l’empêchera pas, pourtant, de vendre le livre le 17 mars de la même année, pour 10 reales, comme atteste la mention du nouveau propriétaire sur la page de faux-titre [39] .
Venons-en, enfin, aux marques et traces laissées au fil de la lecture sur le livre lui-même, qui témoignent d’une volonté explicite et durable d’appropriation, toutes ces scolies, gloses ou apostilles, écrites en marge (les marginalia ) ou entre les lignes, qui peuvent aussi concerner les images et se faire sous forme d’images, [40] et qui en d’autres époques auraient pu être imprimées en regard du texte-source [41] . Toutes ces annotations autographesau crayon ou la plume mais aussi les simples accolades, croix, traits verticaux, soulignage, voire ratures, sont toutes des mémoires de lectures, de l’acte de lire et de la volonté de comprendre…
Depuis longtemps, la recherche littéraire s’est intéressé à ces traces… lorsque le lecteur qui les a laissées est devenu un auteur reconnu. Ce que permet à la critique génétique d’étudier et d’interpréter des traces et commentaireslaissés sur les livres, considérés comme «laboratoire» qu’ils soient ou non ensuite retrouvés de façon littérale ou sublimée, sous forme d’«échos» ou d’intertextualité. Tout ce qui à voir avec la construction du futur écrivain [42] et la génèse de ses textes devient alors ipso facto convoitable et fait l’objet de curiosité et d’exploitation, même négative [43] …
On se reportera, à titre d’exemple, à la lumineuse utilisation par L. Bonet des commentaires de lectures de Góngora par Azorín, apposés sur trois livres conservés à la bibliothèque de Monóvar (l’un d’entre eux étant un véritable companion book ), pour expliquer l’élaboration des points de vue d’Azorín qui est manifestement à la recherche du blanc et les échos mallarméens dont témoigne cette quête (Bonet, 1999).
Mais qu’advient-il lorsqu’il s’agit d’autres lecteurs, de lecteurs restés anonymes, obscurs, sans grade? L’ignorance dans laquelle on se trouve du parcours vital social et intellectuel du lecteur incite sans doute à prêter davantage d’attention –plus humblement- à la lecture elle même -une lecture- à ce que les traces disent d’elle, pour essayer de mieux comprendre l’œuvre de lecture, sans forcément chercher à caractériser le lecteur.
Ainsi les deux lecteurs successifs qui ont laissé des annotations ( l’un à l’encre, avec fermeté dans l’écriture, l’autre, plus malhabile, au crayon) sur El citador (Comentarios a la Biblia). Obra escrita en francés por Carlos Pigault-Lebrun [44] , ont, comme Azorín, fait une lecture intéressée, manifestement avec avec l’idée de s’en (res)servir, en communion avec l’esprit du texte mais sans l’exaltation militante qu’on prête aux anticléricaux ou libres penseurs, en soulignant ou commentant certains passages [45] .
Le plus intéressant, dans tout cela, est sans doute l’ índice particular analytique, comprenant 75 items inséré et relié à la fin, qui forme une sorte de bréviaire au service de la libre pensée et susceptible de fortifier l’esprit [46] . Il faudrait pouvoir disposer de plus d’exemples…
Il s’agit de lectures «intéressées», sélectives, faites depuis une intention et un projet qui porte construction d’un méta-texte, sous forme de commentaires ou d’un index utiles pour d’autres projets peut-être militants…
Les œuvres dramatiques sont, apparemment, celles qui offrent le plus d’informations sur ces modalités d’appropriation utilitaire , lorsqu’elles sont à usage professionnel, pour l’acteur, le régisseur ou le metteur en scène. C’est le cas, par exemple, d’un exemplaire de La Taberna (L’Assommoir) «melodrama en tres actos y ocho cuadros arreglado a la escena española por D. Mariano Pina Domínguez» (1883), qui comporte de très nombreuses annotations manuscrites au crayon, des suppressions de passages –ce qui nous invite une fois à méditer sur l’instabilité et la relativité du texte-, mais aussi des indications de mise en scène [47] . On est ici dans une situation de lecture dont la finalité se situe à l’extérieur du livre considéré: le livre parle d’autre chose que lui et d’un au delà du texte [48] .
Les points de vue du lecteur sont évidemment d’une infinie et sans doute inépuisable variété et il est difficile de prétendre en définir une typologie.
Remarquons cependant qu’une situation assez fréquente est celle où le discours s’applique au discours et porte confrontation, voire affrontement, de points de vue, le lecteur opposant –sans évidemment de réplique- son autorité à celle de l’auteur et s’affirmant ainsi comme une sorte d’auteur-bis. C’est le cas, évoqué par ailleurs (Botrel, 2003c), de ce lecteur de Lunari qui, en 1813, oppose systématiquement en marge des prévisions météorologiques ses propres observations, affirmant ainsi ainsi la supériorité de l’expérience et de la raison sur les conjoctures du pronostiqueur [49] .
Un autre genre de lecture de la part d’un lecteur supérieur et légèrement maniaque peut être observé dans un exemplaire de El Clown verde por José María Tárrago [50] , immédiatement qualifié par un sous-titre manuscrit mis entre parenthèse, comme sur certaines pages de titre de romans (Botrel, 2001b): «(Novela estrambótica y desagradable)». Suivent 90 commentaires ou apostilles au crayon à papier sur les 184 pages du livre, sans compter les nombreux mots ou phrases passages soulignés au crayon à papier et les points d’exclamation ou d’interrogation. On assiste en de nombreuses occasions à une véritable interpellation d’un auteur sans défense puisqu’on sait qu’il ne pourra répondre [51] . A travers cet exercice de critique en règle et sommairement formalisée, le lecteur manifeste sa supériorité à bon compte mais montre aussi comment un lecteur de roman assigné à un lectorat «populaire» peut accorder de l’importance à un tel objet, au point d’en faire une lecture non ingénue et se défouler à propos du texte, pour un plaisir qui est peut-être moins dans la lecture du texte lui-même que dans le prétexte qu’il offre de produire un discours supérieur [52] . Se trouve en tout cas révélée et presque caractérisée un type de lecture souvent inavouée parce que secrète et peu avouable…
Les traces de plusieurs lecteurs successifs dans un même livre ou exemplaire, en permettant la comparaison des lectures faites (comme dans le cas de El Citador ), et qui peuvent même donner lieu à une sorte de mise en abyme rendent l’interprétation encore plus instructive. C’est ainsi qu’un exemplaire de la Raquel de Vicente García de la Huerta, qu’un lecteur préfère appeler, dans un titre adventice manuscrit, La Hermosa Raquel [53] , nous permet d’observer un échantillon de lectures de la part de deux lecteurs comportant des réactions émotives à propos de tel ou tel personnage, de nombreuses réflexions sentencieuses et moralisantes, mais aussi des manifestations d’approbation ou de désaccord, l’un des deux lecteurs connaissant déjà la pièce puisqu’il est capable d’anticiper sur le cours de l’histoire [54] . Mais cet exemplaire nous offre aussi un double commentaire d’un propos tenu par Raquel («No hay calidad, sino el merecimiento: la virtud solamente es nobleza») qui permet d’observer «sur pièce» la pluralité des lectures et leur polysémie. C’est ainsi que pour le premier lecteur: «Aqui respira el Autor (mas qe instruye) su sobervio indócil genio»), ce commentaire étant lui-même commenté par le second lecteur [55] , sous forme de réfutation exaltée, une sorte de tirade qui s’adresse aux nobles et qui se termine par «He dicho»!!!, comme s’il s’adressait à un noble présent [56] . Selon René Andioc à qui j’ai soumis cette nouvelle pièce d’un dossier qu’il connaît si bien, «ni l’un ni l’autre n’ont bien vu où l’auteur voulait en venir avec les deux vers concernés, que prononce un personnage «mauvais» et par conséquent dont le contraire de ce qu’il dit doit être considéré comme seul valable» [57] . Le premier qui semble pourtant connaître l’œuvre oublie en la lisant ce que la représentation doit exprimer avec plus d’évidence. Le second, qui est dans la même situation, produit un métamétadiscours qui semble également oublier la source pour se centrer sur le commentaire…
Ce véritable jeu de miroirs dont rendent compte quelques modestes annotations manuscrites de lecteurs in libris ouvre, on le voit, sur l’abyssale polysémie du texte et la pluralité des lectures, qui peuvent aller jusqu’au contresens, mais aussi sur les idéologies à l’œuvre, tout comme au théâtre et dans l’oralité…
Conclusion.
Toutes ces évidences pour qui veut les voir parlent de façons de lire, de moments, de lieux, de rapports, d’éventuelles communautés, bref d’une complexité qui nous situe à cent lieux du lecteur abstrait, aseptique et conforme et, au contraire, rend compte de lectures dans toute leur diversité, leurs nuances ou leurs contradictions.
Toutes ne sont pas visibles en même temps ni a fortiori à propos d’un même «livre»; elles n’ont pas toutes la même valeur et, de toutes façons, il y a plus de livres sans marginalia qu’avec, l’absence de celles-ci n’étant pas évidemment synonyme d’absence de lecteurs ni de lectures. La question du lector in libro est donc complémentaire –voire subsidiaire- des autres approches évoquées au début, l’essentiel de sa productivité étant peut-être à rechercher dans l’état d’esprit qui la sous-tend.
Car, pour le chercheur, hispaniste ou non, quel est l’enjeu de tout cela? Non pas prétendre instituer une génolecture pour faire pendant à une très légitime génocritique, mais faire admettre qu’il est pertinent d’étudier à la fois l’œuvre et sa mise en œuvre, y compris dans le livre, et que le texte/discours, y compris iconique, ne peut être dissocié –sauf à biaiser le cours du sens- de l’ensemble (paratexte, texte, images, livre, tout support imprimé) où il s’offre aux lecteurs, de l’activité à laquelle il donne lieu –une lecture explicite ou non- de sa destination, de sa fonction, de son utilité…, bref de son appropriation, depuis des intérêts et avec des pratiques pour le moins contrastés. Apprendre, donc, à lire le livre tel qu’il est, dans tous ses états, en tenant compte de la multiplicité de ses lecteurs et de la diversité des lectures. Admettre qu’il y a dans un livre un autre lecteur que soi, y compris dans les livres qui se trouvent hors de notre sphère d’intérêt habituelle. Affirmer et connaître le rôle –plus que l’identité- des lecteurs, lisants et autres lisards , les anciens et les nouveaux –toujours nouveaux-, y compris à l’époque d’une culture de masse réputée uniformisatrice, en leur manifestant la considération et le respect qu’ils méritent.
Cela amène sans doute à mettre en question une herméneutique conçue comme un dogmatisme habillé de scientificité ou empreinte de subjectivité, mais certainement pas à renoncer à une pédagogie de la lecture: comme le rappelle J. M. Castellet, «quien quiera obtener los beneficios y el placer de la lectura de un buen libro, tendrá que ganárselos, trabajando en la elaboración de su lectura, igual que el escritor ha trabajado anteriormente en la elaboración de la obra» (Castellet, 2001, 65).
Il s’agit, donc, de constater que plus que des legenda il existe des legendabilia , de démocratiser et de partager la responsabilité du texte et du sens, et, en renonçant au costume et au masque de SuperLecteur, de devenir, tout simplement, au bénéfice des autres, le simple ouvrier de l’œuvre.
J.-F. BOTREL (Université Rennes 2/PILAR).
Etudes citées:
Bonet, Laureano, «Góngora entre los modernistas: Unas páginas de Azorín», in : A. Vilanova, A. Sotelo Vázquez (eds.), La crisis española de fin de siglo y la generación del 98. Actas del simposio internacional (Barcelona, noviembre de 1998) , Barcelona, Universitat de Barcelona, 1999, p. 301-313.
Botrel, Jean-François, "La novela por entregas : unidad de creación y consumo», in : Creación y público en la literatura española , Madrid, Castalia, 1974, p.111-155.
----, "El teatro en provincias bajo la Restauración : un medio popular de comunicación ", Bulletin Hispanique , LXXIX, n° 3-4, juil. - déc 1977, p. 381-393.
----, "Le Gran Teatro Regional et le théâtre démontable en Espagne en 1973", in : Études et documents du laboratoire d'Études Théâtrales , Université de Haute Bretagne - Rennes 2, I, 1979, p. 69-77.
----, "La iglesia católica y los medios de comunicación impresos en España de 1847 a 1917 : doctrina y prácticas", in : Metodología de la historia de la prensa española , Madrid, Siglo XXI, 1982, p. 119-176.
----, "Le succès d'édition des œuvres de Benito Pérez Galdós : essai de bibliométrie. I", Anales de Literatura Española , 1984, n° 3, p. 119-157.
----, "La diffusion de Madrid Cómico (1886-1897)", in : Presse et public , Université de Rennes 2 Haute-Bretagne, 1984, p. 21-40.
----, "Le succès d'édition des oeuvres de Benito Pérez Galdós : essai de bibliométrie. II», Anales de Literatura Española, 1985, n° 4, p. 29-66.
----, "Paysages et industrialisation : les visions d'Armando Palacio Valdés dans La aldea perdida ", in : L'homme et l'espace dans la littérature, les arts et l'histoire en Espagne et en Amérique Latine au XIXème siècle , Université de Lille III, 1985, p. 157-169.
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Légendes pour les illustrations:
1. Reliure et marque de propriété pour El Castillo de la locura .
2. Mesure et mémoire de la lecture sur un exemplaire de Cánovas (Madrid, Perlado, Páez y Compañía, 1912).
3. Annotations à usage professionnel sur un exemplaire de La Taberna (L’Assommoir) . (…) por D. Mariano Pina Domínguez (Madrid, 1883).
4. Pages de l’index analytique manuscrit relié à la fin d’un exemplaire de El citador ( Comentarios a la Biblia). Obra escrita en francés por Carlos Pigault-Lebrun, Madrid (1884?) (Biblioteca de El Motín ).
5. Commentaire par deux lecteurs d’une phrase de la (hermosa) Raquel de Vicente García de la Huerta.
[1] Botrel, 1974.
[2] Botrel, 1987, 1984a-1985a, 2000ab, 1984b, 1989a, sans exclure la sociologie du théâtre( voir Botrel, 1977, 1979).
[3] Botrel, 1994, 1999, 1985b.
[4] Botrel, 1989b, 1997ab, [5] Botrel, 1982, 1998a, 2000c.
[6] Botrel, 1994a, 1993, 1995a, 1996a, 1997c, 2001a, 2002a, 2003.
[7] «le format des livres, les dispositions de la mise en page, les modes de découpage du texte, les conventions typographiques sont investis d’une «fonction expressive» et portent la construction de la signification. Organisés par une intention, celle de l’auteur ou de l’éditeur, ces dispositifs formels visent à contraindre la réception, à contrôler l’interprétation, à qualifier le texte. Structurant l’insconscient de la lecture (ou de l’écoute), ils sont le support du travail de l’interprétation («Textes, formes, interprétations», Préface à D. F. Mac Kenzie, La bibliographie et la sociologie des textes , Paris, Cercle de la Librairie, 1991.),
[8] Botrel, 1998bc, 1995b, 1996b, 2001b.
[9] Voir Botrel, 2000d, 2002bc.
[10] A ce moment de ma quête, je n’ai pu repérer qu’une quarantaine de documents pertinents que j ’ai trop tardivement commencé à acquérir ou recueillir. On sait pourtant comment les historiens ont su utiliser les traces manuscrites de ces situations de dialogue avec l’autorité imprimée (Darnton, 2001, 29).
[11] A la limite, le livre peut être destiné au corps –ou à l’âme- comme ces poésies «remèdes» éditées en Espagne et conditionnées dans des boîtes de/à médicaments, vues au Salon du Livre, à Paris, en mars 1995.
[12] Des exemples de mise en œuvre de consignes éditoriales ou auctoriales dans Botrel, 1996bc
[13] La nature des cadeaux est évidemment également parlante. Parmi ce qui est proposé: « 1. La encuadernación de la obra en los tomos que se citen al final de la misma con letras estampadas en oro, 2. Un juego de cristalería con 13 piezas, 9. Una plancha eléctrica, 10. Un paraguas de señora o caballero, 11. Un cuadro, a elegir, religioso o de comedor, 18. La barca de Pedro («Virginidad perdida») por don Antonio Alarcón. Un tomo con 292 páginas encuadernadas, 20. El mejor regalo: Ortografía por A. Ruiz Robles. Para personas de cualquier edad. El método más completo, práctico y eficaz par escribir correctamente.
[14] Carta de 7-VIII-1966 (Delibes/Vergés, 2002).
[15] Carta de 27-VIII-1966 (Delibes/Vergés, 2002)
[16] Dans cette «curiosa composición tipográfica», Delibes avait également envisagé un «caligrama al final », absurde, selon Vergés, pour lequel «la composición tipográfica es sólo un vehículo para expresar ideas y éstas, cuanto más claramente se expongan, mejor. Pretender hacerlo a través de la composición es poco ortodoxo y de ninguna eficacia». Pour lui, il s’agit d’une «originalidad gratuita»: « tus lectores van a llevarse una sorpresa, creando con ello un cierto confusisonismo» (Delibes/Vergés, 2002, 282). La façon d’utiliser les guillemets, l’italique ou les majuscules est également signifiante pour Delibes, tout comme auparavant pour Clarín (Botrel, 2001c).
[17] Comme cette mention trouvée sur une édition de 1891 de Nubes de estío de Pereda: «Al Sr. D. Ramón Ferrer otorga este accesit el Jurado clasificador de los trabajos literarios de la Gran Peña Continental (signé: R. Picó, F. Fabra, R. Rubio, V. de Alemany, G. Bruguera)».
[18] Mais il peut s’agir aussi de l’affirmation d’une autorité («No tome la novela sin este sello», dit la Casa Alonso (Sans, 240 2° 1 a ) , le 8-V-1930) ou d’une assignation du livre à des fins qui ne supposent pas de lecture, comme ces «Libros para decoración en piel desde 500 pesetas» vus au Rastro de Madrid, en juin 1996.
[19] Comme cette note manuscrite au début d’un chapitre de La Bruja blanca de Julio Ascano (p. 11) (col. JFB): « Lo que va subrayado en este capítulo y el siguiente no se ha de leer» (Botrel, 1993).
[20] Botrel, 2002a.
[21] Comme pour ces «feuilletons» de Blanco y Negro , découpés dans la revue, et dont les pages ont été numérotées à la main. Sur le dos des trois volumes résultant de cette opération, la simple mention «Folletines».
[22] Comme cet exemplaire de El Castillo de la locura (La Novela vivida, 12-V-1928, n° 2) (col. JFB), relié avec du carton de récupération (pris à Dirección General de Seguridad) avec collé sur la une de ce qui est devenu la couverture, une illustration dénotative, le titre étant manuscrit dans un cartouche et le nom de la collection également manuscrit.
[23] Comme sur cet exemplaire de Juan José de J. Dicenta (Madrid, Sociedad de Autores Españoles, 1918) où le titre de l’œuvre a été artistement dessiné sur une couverture faite à partir de papier musique, au crayon rouge et bleu, tout comme le nom… du propiétaire: Fco García (col. JFB). Autre exemple: sur la sur-couverture d’un exemplaire de La Loca de la Casa est apposé le nom de « Doña Enriqueta Palma» (mais pas celui de Galdós), avec la mention «1 er Apunte (col. JFB). A la même logique d’appropriation appartient, bien entendu, la pratique de porter le nom ou les initiales du propriétaire du livre au dos de la reliure ou encore, le fait de relier quelque 1 250 livres, la plupart de la fin du XIXe siècle, en toile pourpre, avec un dos rouge et, sur le dos, tapé à la machine, le nom de l’auteur et le titre et un numéro d’ordre sur une étiquette collée, d’autres propriétaires de livres factices cette fois leur attribuant un nom générique: «Novelas», «Cosas varias», «Obras dramáticas»…
[24] Ce peut être aussi le cas bien connu du découpage –révérent ou profanateur- de parties de texte imprimé ou plus simplement de lettres dans les almanachs et dans la presse, pour des usages détournés ou dérivés qui purent aussi concerner le papier du journal.
[25] Il s’agit de l’édition de 1925 par Biblioteca Nueva. Le livre truffé de photographies, de nombreux découpages de vignettes de pliegos de aleluyas , une image pieuse, une carte du PCE, un trèfle à trois feuilles, une traduction française de «Invierno», et même un billet de Machado, etc. , dans une perspective dénotative faussement ingénue et provocatrice, induit un autre lecteur qui apporte d’ailleurs des corrections à son propre texte, reprises dans les éditions ultérieures, et une autre lecture. Cet autre livre a été édité en facsimilé (Madrid, Visor Libros, 2002).
[26] C’est ainsi que pour illustrer les chapitres V et IX de El castillo de la locura ( Breve historia retrospectiva de Méjico, Carlota y Napoleón), des illustrations (El Emperador Maximiliano, Fusilamiento del emperador Maximiliano y de los generales Miramón y Mejía, La Emperatriz Carlota, El general mejicano D. Tomás Mejía, El general mejicano D. Miguel Miramón) ont été découpées dans ABC (mention de l’origine est faite à la plume) et collées sur encart (p. 32-33, 48-49), en complément des illustrations originales (pp. 14, 52 et 59).
[27] Comme l’ Album de recuerdo de España de Mr. Constantino Sidorowich encargado de negocios del Imperio ruso en Madrid (con 300 dedicatorias de los personajes más relevantes del siglo XIX entre los años 1874-1880, trouvé au catalogue de livres anciens de la Librería García Prieto.
[28] Comme cet Agenda et annuaire de la magistrature du barreau du notariat et des officiers ministériels de 1927 converti à partir du 19 février 1947 en Libro de Cantares par María Rosa Huerta, puis, par María Antonia Lainez Huerta qui ont utilisé la partie en blanc de l’agenda pour recopier des chansons de l’époque comme «Lili Marlen» (versions en allemand et en espagnol), «Bésame mucho», etc., pour une pratique privée bien connue et qui, sauf le répertoire, n’est pas propre à l’Espagne primo-franquiste(col. JFB). On sait que les éditeurs eux-mêmes ont pu se livrer à ce type de manipulation, en opérant des changements de couverture et même de destination, comme ces «Books of love», proposés en vitrine d’un magasin de cadeaux de Plélan-le-Grand (Ille et vilaine) en mars 1993, et dont il était précisé qu’il s’agissait de livres récupérés avant incinération, «purifiés» à 6 ou 7 reprises. Sur la première de leurs pages soigneusement traitées afin qu’elles soient ondulantes, avec une tranche dorée, était collé un unique poème d’amour.
[29] C’est le cas de nombreux albums (cf. Botrel, Felisa ) dont certains ont été répertoriés comme «composiciones de cromos» (Ramos Pérez, 2003, 531), mais aussi dans un circuit bien différentces quelque 20 agendas des années 1950, remplis de découpures de dessins humoristiques parus dans la presse, avec un titre lui-même découpé: «Nuestra sonrisa», «Ría y sonría», «Nuestra chispa estrepitosa«, etc.. , livres factices vus au Rastro de Madrid en 1998.
[30] Il existe au moins un libraire (à Cordoue) qui collectionne ces traces laissées par les lecteurs dans les livres qu’il acquiert (marque pages, images pieuses, fleurs séchées, trèfles, lettres, billets, listes de courses, etc.), mais sans enregistrer leur origine, ni leur statut éventuel.
[31] «El libro yacía allí, sobre la mesilla de noche y bajo sus tapas, los últimos pensamientos de Mario, como enlatados» ( Cinco horas con Mario, p. 21 de la première édition).
[32] Deux exemples, au hasard des trouvailles: laissé entre les pagesde l’ Almanaque Omnibus para 1846 (BNM CV 747-13), cette composition: «S n Valeriano Martir S ta Humbelina V. Mortificacion. Serás tirano contigo/si a tu carne alhagas ( sic ) pues/tratar bien tu carne es/dar armas a tu enemigo/sin preocupacion te digo/que sino vences tu antojo/serás misero despojo/de su frenesi protervo:/mira no cries al cuervo/para q e te saque el ojo. Año de 1789.», ou dans El Cid y Roldán d’Eduardo Marquina (Madrid, CIAP, 1929, El libro del pueblo n° 2), deux recordatorios (l’un en catalan, l’autre en castillan de 1949 et 1951) outre une histoire drôle dactylographiée et découpée («Erase un noble inglés de elevada alcurnia. Par del Reino, de la Cámara de los lores y descendiente, en línea recta, del Rey Arturo.Tenía siete hijos. El mayor era banquero; el segundo, tambien era ladrón. El tercero era un distinguido «sportman»; el cuarto, tampoco hacía nada.El quinto se alistó en la R.A.F.; el sexto tampoco fue a la guerra. El séptimo,!Oh el séptimo!……. el séptimo, tampoco era hijo del lord»).
[33] Comme celui d’un certain Yerro (dont le nom donne lieu dans le tampon qu’il appose à une construction en croix), également présent dans El Castillo de la locura déjà décrit, avec le cachet de ses initiales «AY». Dans un exemplaire de Los caballeros del firmamento de Paul Féval (col. JFB), le propriétaire n’a pas craint de signifier cette qualité (sur la contregarde et p. 103) avec… un cachet à la cire rouge!
[34] Par exemple, «D. B y V» dans un exemplaire de El caballero de Casa-Roja (Madrid, Mellado, 1848), ou, sur un livre en 1854, «Este libro me costó 40 rs».
[35] Par exemple: «Hallador sabio y prudente que este libro te has hallado, sepas que lo he perdido por tenerlo mal guardado y si volverlo no quieres bien te puedes acordar del séptimo mandamiento que nos manda no hurtar y si quieres saber mi nombre aquí bajo lo pondré Valeriano tengo por nombre para la Virgen servir y García y Tomás son apellidos para con Cristo morir. Alcira, 16 Marzo de 1866/Valeriano García» (trouvé dans un exemplaire du Manual práctico de lengua griega por D. Raimundo González Andrés, Madrid, Imp. Nacional, 1861 et transcrit à Salamanque en novembre 2002 (Feria del Libro Antiguo de Salamanca, Librería Asilo del Libro).
[36] Par exemple, «Este libro lo ha leído José Ribelles (il s’agit de sa signature)», sur un exemplaire du Cristóbal Colón de Lamartine édité à Madrid par Manini en 1867 et ayant appartenu à un autre dont les initiales figurent sur le dos de l’exemplaire (vu à Valence, Librería anticuaria Rafael Solaz, en mai 2003).
[37] Voir Infantes, Lopez, Botrel, 2003, 783 et Botrel, precio ). José Requejo Buelga a également écrit sur le recto de la dernière garde volante, cette sentence en latin: «Initium sapiencie ( sic ) est timor Domini. Domine, labia mea aperies; et os meum anunciabit laudem tuam. Laus Deo. Amen».
[38] Page 5: 30-11-36-23 1/2; p. 128: 1-12-36 24 1/2; p. 269: 3-12-36-23 1/2; p. 278 4-12-36-13, ce qui donne des quantités de lecture de 13 600 à 110 000 signes, environ 200 000 signes tous les deux jours et 51 250 en moyenne, pour un livre qui en compte environ 410 000. Par ailleurs , les accolades et traits verticaux ou horizontaux (avec le même crayon) mériteraient d’être interprétées comme éléments révélateurs d’une lecture particulière, le crayon à la main.
[39] Vu à Valencia, Librería Auca.
[40] Cf. supra le commentaire par l’image de Marinero en tierra par l’auteur lui-même ou celui de El castillo de la locura par un certain A. Yerro.
[41] C’est le cas, par exemple, des commentaires apposés à la plume sur certains tomes de la Biblioteca de Autores Españoles lui appartenant, conservés à la Biblioteca Menéndez Pelayo, et qui, sauf erreur, attendent encore qu’on s’y intéresse vraiment (merci à Andrés del Rey Sayagués de me l’avoir signalé)
[42] Le «Muera Catalina» trouvé dans le manuel ayant appartenu au jeune Leopoldo Alas prendra ainsi un sens qu’il n’aurait pas eu, trouvé dans un volume anonyme…
[43] C’est le cas, par exemple, de l’exemplaire de La Regenta dédicacée par Leopoldo Alas à Menéndez Pelayo (conservé à Santander) , qui ne comporte aucune trace de lecture, et qui pourtant, on le sait, a bien été lu, d’une façon ou d’une autre,par celui-ci, ou de la plupart des volumes de la bibliothèque de Galdós, étudiée par Josette Blanquat, conservés à la Casa Museo de Las Palmas.
[44] Madrid (1884?) (Biblioteca de El Motín ) (col JFB).
[45] A titre d’exemples des annotations du premier lecteur: «Moises/nada es/cribio» (p. 64), «Jesús no/ fue muer/to y sí Si/mon Cirineo» (p. 87), «limosna/ de Sn Pedro» (p. 106), «La con/fesion/ fue publica/ y luego/ secreta /el porque /leen» (p. 116), «Derecho de pernada», (p.121), «por que y/ quien restablecio el/ culto a las/ imagenes» (p. 126), «Dedonde/ viene el/ ser rey/ y Padre Santo» (p.141), «inquisi/cion como/ seformo» (p. 148), qui ont sans doute servies à préparer un index (cf. infra). L’autre lecteur est encore plus laconique, dans sa démarche analytique («prostitución pública», «misa y la cena», «bautismo», «Dios que/ ace chiqui/llos ala vir(gen)» (p. 118), «calzoncillos de S n Pancracio» (p. 118)) ou dans ses commentaires ( «Estracto a los estudiantes y a las beatas» (p. 62), «chusco» (p. 107), «chico/ gracio/so» (p. 108), «lo que se paga a los curas y demas es (?)» (p. 138).
[46] Exemples: Trinidad no es de los cristianos… 31, Agua bendita es robada…32, El señor dice a Oseas, toma una/ muger fornicadora hazle hijos/ e hijas y demas lindezas y asesinatos...61, Cuando resucitemos (gracioso) mugeres… 98, 50.000 quemados en la inquisi-/cion y separacion de las dos iglesias…131, Cuenta de los muertos por/ la gloria de Dios…157, le deuxième lecteur ayant manifestement utilisé cet index puisqu’il y ajoute, pour renvoyer à la page 69, «las nuncias» (qui correspond à «segundas nuncias» (pour «nupcias» (de José con María)), annotation qui figure bien p. 69.
[47] Par exemple: «dia», «noche», une liste d’accessoires nécessaires, un croquis de la scène avec le trou du souffleur, etc. (cf. pp. 64-65), annotations dues à quelque «primer actor» metteur en scène ou régisseur inconnu, auxquelles j’ai ajouté mes propres soulignement et commentaires au crayon qui pourraient un jour plonger dans la perplexité un futur chercheur!
[48] Sur un exemplaire de La portera de la Fábrica . Melodrama de espectáculo en siete actos de A. Moreno Gil Barcelona, 1886 (col. JFB), on trouve, sur la surcouverture un titre manuscrit (Portera de la fábrica de A.C.), un peu partout les initiales CE apposées au tampon à encre, une dédicace de l’auteur «al primer actor y director D. Luis Santigosa», ainsi que (au crayon à papier) la distribution et des notes marginales servant au régisseur (campana, carta y papeles, relámpagos y truenos lejos, más cerca, fuerte, canto del cuco, voces dentro, aldeano con llaves, etc.)
[49] Par exemple, là où le Lunario meteorológico nuevo y curioso para el año de 1813 (Palma, Imprenta de Villalonga, Año de 1813, BNM D/6146) avait prévu, pour le 13 janvier 1813, «Viento O Nubes con relámpagos», l’annotation dit: «Día claro viento N. y E.». Et à la prévision pour le 6 juillet: «Tronada tempestuosa con vientos E.S O.S», correspond la très laconique observation: «Nada».
[50] Madrid, Montes, Torres y Cía, editores, s.d. (1879) (col. JFB).
[51] A titre d’exemples: «¡Cuánta bobería dice José María!», «José María,/ ¿otra curs i /lería? (p. 157), « ¿Ya? ¡Ya! ¡Pues arre!», avec la dénonciation (presque en règle) des incohérences, des incorrections, des truismes (cf. « Firmado «Pero Grullo»!»), maladresses, etc. et des commentaires exclamatifs comme: «¡Caray con el matiz!», «!Seguro!», « ¡anda morena!», ou plus «littéraires»: «Parece el guía indio/ de los Sobrinos del Capitán Grant» (p. 38), «Os aborrezco»/«Horresco referens» (p. 121), «desabrochóse el levita»/ «Desabrochóse el levita y la chaleco» (p. 124), «María era hermosa como el primer rayo del sol de la mañana…»/ ¡Poesía!, «… el cristianismo la había sublimado»/»Pero no sería/ sublimado corr o /sivo.» (p. 79), «Vuelve al Africa la golondrina»/ «El 9 de agosto/ no vuelven al/ Africa las golo n /drinas» (p. 157), ou encore «Esta frase no está mal» (p. 154), avec, par ailleurs, une évidente maîtrise du lexique, de la syntaxe, de l’orthographe, de la ponctuation, etc.
[52] On peut reconnaître là la marque de la façon d’Antonio de Valbuena dans ses fameux (à l’époque) ripios (Botrel, 1994b) ou de Clarín dans certains de ses paliques, dont les émules furent alors nombreux.
[53] Cet exemplaire (col. JFB), acheté en juin 1996, Cuesta Moyano à Madrid, auquel il manque les 6 premières pages et les dernières, correspond, selon René Andioc que je remercie de son expertise, à l’édition des Obras poéticas de Huerta par Sancha, en 1778 (tome 1), à un détail près. Il a appartenu à («Soy de») Fidel Gregorio Fernandez puis Gregorio Fidel Fernandez et Justo Giron ( p. 39) et peut-être aussi à Samuel Albarez (on trouve aussi les noms de Modesto et Señora Modesta Fernz), offre, dans ses 86 pages, 89 apostilles dont la longueur varie entre un mot et quinze, plutôt brèves en moyenne, sauf une longue réponse reproduite et transcrite infra.
[54] Quelques exemples de commentaires dont l’analyse purement paléographique ( l’usage du kappa pour le r)atteste d’une réaction contemporaine. Il peut s’agir de manifestations d’approbation («Si señor» , «No hay duda», «Muchos conozco», «Bueno», etc., d’interpellation des personnages ou de manifestations de sympathie (p. 60: «Embustera « quand Raquel dit au roi Alfonso: «Quanto me pesa en este llanto explico», p. 82: «Preliminar/ de tu desgracia», p. 56: «A quien/ no haran/ claudicar/ tales recu-/rsos!, en se mettant à la place d’Alfonso «victime des assauts de Raquel, «Es ilusión» se demande Alvar Fañez: « Así es» écrit le commentateur), de commentaires savants ( p. 49: «Lo corrobora/ la instructiva/ comedia de Juan/ Labrador»), moralisants ou sentencieux (p. 70: « ¡Qué deso/-lacion no/ causa el/ desorden de un/ Rey!», p. 72: « Pueblo en-/furecido no/ admite/ prudente/ consejo», p. 90: « Tengamoslo/ presente», p. 91: «No es solio quando/ lo ocupa q n no na/ció para él.» (en réponse à «¿No contiene ese Solio vuestras iras?»), p. 81: « Buen frenesi/ de un Rey, y/ asombrosa to-/lerancia de sus/ vasallos!», réservés (p. 78: «Punto delicado para comentarle como merece») ou qui manifestent une connaissance préalable de l’œuvre: ainsi lorsqu’il est dit (p. 84): «de Hernando las audacias se deben castigar», le lecteur-commentateur peut assurer: «no llegará el caso», ou encore (p. 84): «se va abolber la tortilla».
[55] En voici la transcription (sous réserves de vérification par un spécialiste): «De esto no puedo/ menos de decir /(atendida la necedad y maja/deria de algun/ noble tontuelo que puso lo an/terior) q. no sola/m te el autor/ no respira/ un soberbio indocil/ genio como su/pone el indecen/te sino es q. dice la verdad por q. ¿como puede haber/ calidad y noblezasino hay vir/tud y mereci/miento. Es cosa/absolutamen te absurda el creer tal cosa. Se que/dan los tales señores en creer q. con tener una o/ unas rancias executorias apolilladas y comidas de ratones/ poseen un tesoro inagotable. Ahora bien/ digo yo, las tales executorias, las han gana/do ellos o las han encontrado de mil años atras/ en sus cofres metidas de infinidad de gene-/raciones anteriores sin las cuales no existieran/ sus tales excecutorias? Ahora quisiera/ q e hubiere alguno para responder/me. Si es lo primero (…?…)/ la sobervia qe/acostumbran/ y ahora bien/ si la gastan,/ les falta una de las (…?…) mas necesarias/ para la nobleza porq e como puede haber nobleza de/ procederes (?) ni virtud donde/ hay soberbia/ es absoluta-/mt e imposible. Y si lo segundo no tienen en g l / (…?…)porq e como no la han ganado sino q e sin virtud ni merecim to se la han/ encontrando ( sic ) no devian ser tan locos (?)/. Amigo lector perdona/ si eres noble esta critica/ q e te parecerá mordaz pero no he podido por me/nos atender a la critica de ese hombre inde/cente que se pone a criticar/ quizá sin haber leido un libro bueno.He dho» (p. 83).
[56] Ce lecteur écrit, en effet, comme il aurait parlé, pratique courante que M. Frenk (2000) a caractérisée comme consistant à «hablar por escrito».
[57] Courrier à JFB du 25-XI-1997. Sur ce point, voir son introduction à son édition de Raquel (Madrid, Castalia, 1970, pp. 7-51).